OCTO Technology vient de publier son dernier livre blanc Culture Kaizen, la transformation des petits matins. Les auteurs Cecil Dijoux, Nicolas Ploquin et Théodore Broche nous racontent par le menu comment l’application respectueuse (c’est-à-dire du Toyota Production System) des principes et techniques du Lean apporte un nouvel étage à la fusée Agile pour s’extraire de l’attraction terrestre. C’est pour cela que j’ai nommé cet article : Culture Kaizen d’OCTO, du petit pas au bond de géant pour l’IT.

Le Lean peut ainsi être vu comme une façon d’aller plus loin que l’Agile pour toute personne, dirigeant, manager, product manager, praticien de l’agile, consultant. »

Source : Culture Kaizen, la transformation des petits matins, Ludovic Cinquin (CEO OCTO Technologie), OCTO Technologie, 2023

Propos liminaires

Après trente années à travailler dans l’IT, dont quinze dans la qualité avec sa multitude de normes et référentiels méthodologiques et dix à me former et à pratiquer le Lean issu de Toyota, je ne cesserai de dire que le Lean est la solution pour relever les défis qui sont toujours plus nombreux.

Pourquoi ? Parce que « le Lean n’est pas un système de production, mais un système d’apprentissage et de formation », comme l’écrivent les auteurs. Mais ne nous trompons pas ! Ce système d’apprentissage et de formation ressemble en aucun cas aux formations classiques que l’on trouve dans toutes les entreprises. Non, ce système d’apprentissage et de formation se déroule quotidiennement sur le terrain grâce à la résolution des problèmes ! Et là, ça devient plus compliqué…

Michael Ballé expliquant ce qu’est le Lean Management. Source : APM

Une vraie transformation Lean prend du temps, beaucoup de temps, plus de trois ans… De plus, c’est difficile, car elle nécessite des remises en cause profondes et ce à tous les niveaux de l’entreprise ! Et quand c’est difficile, une des techniques d’évitement est de dire que les coachs sérieux sont dogmatiques, alors que ce n’est que de la rigueur pour réussir !

Le discours de John Kennedy du 12 septembre 1962 pour lancer la conquête de la Lune résonne fortement en moi. Peut-être parce que j’ai passé des années à faire des aller-retour dans de nombreuses piscines. Il m’interpelle surtout parce que, de plus en plus, l’IT a la fâcheuse tendance de s’inscrire dans la facilité pour aller vite, plus vite, toujours plus vite ! Elle court après le temps et auto-génère ses propres difficultés (les mauvais choix, la non-qualité, insatisfaction des utilisateurs mais également des équipes…). Sans compter qu’elle est encore très loin d’offrir une vraie User Experience qui pourrait faire d’elle une véritable aide, et pas une somme de contraintes, pour les utilisateurs.

We choose to go to the Moon. We choose to go to the Moon in this decade and do the other things, not because they are easy, but because they are hard, because that goal will serve to organize and measure the best of our energies and skills, because that challenge is one that we are willing to accept, one we are unwilling to postpone, and one which we intend to win, and the others, too. »

Source : Discours de John Kennedy à l’université Rice, John Kennedy (Ted Sorensen), 12 septembre 1962

Ces propos liminaires me paraissent nécessaires, car nombre des lecteurs de Culture Kaizen, la transformation des petits matins pourraient être surpris par les histoires et les résultats obtenus, voire même en douter tellement elles peuvent sembler trop belles. Pourtant, nous sommes nombreux – pas assez, encore – à obtenir des résultats du même ordre 😋

Pour finir cette introduction et éviter toute mauvaise interprétation de cet article, je précise que je n’ai aucun lien de près ou de loin avec OCTO Technology. Vous trouverez mon nom en bas de la page 4 du livre blanc parce que j’ai accepté la proposition de Cecil Dijoux (ancien collègue d’Operae Partners) : contribuer à la relecture finale. Bien évidemment, nous partageons la même passion pour le Lean Management !

Des histoires de résolution de problèmes

Comme l’écrivent les auteurs, « Dans la pratique Lean, nous avons à cœur de définir un problème sous la forme d’un écart chiffré entre une situation actuelle et une cible. »

La résolution de problème avec la technique du PDCA (ou le A3) est au coeur du Lean Management pour supprimer définitivement ce qui ne crée pas de valeur pour le produit / service à destination des clients / utilisateurs. Les histoires racontées par les auteurs sont toutes structurées comme un PDCA : quel est le problème, quelles sont les propositions d’amélioration (nommées également contre-mesures par Toyota), quels sont les résultats par rapport au problème et quels sont les apprentissages.

Une proposition théorique qui n’est pas validée par une expérimentation sur le terrain permettant d’établir, sans ambiguïté, une relation directe de causalité entre les pratiques mises en œuvre et les résultats mesurés, est pour nous de la matière inerte. »

Source : Culture Kaizen, la transformation des petits matins, C. Dijoux, N. Ploquin, T. Broche, OCTO Technologie, 2023

Certes, il est facile de faire dire ce que l’on veut à des chiffres. Pourtant, la mesure est clé dans l’accompagnement Lean des équipes, car c’est le seul moyen de démontrer s’il y a eu une amélioration ou non. C’est le seul moyen de prouver que l’expérimentation d’une proposition fonctionne ou pas.

Les histoires que vous lirez dans Culture Kaizen, la transformation des petits matins d’OCTO sont toutes illustrées par des mesures avant / après. C’est une règle de communication que nous pratiquons en amélioration continue.

Toutes ces histoires portent aussi bien sur le Build (développement d’un produit) que sur le Run (traitement des incidents en production et, parfois, petites évolutions) dans une variété de typologie d’équipes : petites, grandes, à l’échelle, en sprint avec du Scrum, en flux, utilisant SAFe…

Des histoires humaines

Selon Marc-Antoine Lacroix (CPO, QONTO), un des points essentiels pour l’entreprise « est ce que les collaborateurs disent de ton entreprise, les références internes. Une équipe heureuse et fière de son travail est la meilleure stratégie de recrutement. Si elle est heureuse au jour le jour, si les collaborateurs peuvent constater qu’ils progressent quotidiennement et qu’on leur laisse l’espace pour s’engager, alors ils vont faire marcher le bouche-à-oreille. »

Le Lean Management est humain et ne vise pas à déterminer qui est responsable d’un problème. Ce qui importe, c’est de comprendre pourquoi le système (= entreprise) a créé les conditions pour qu’une personne génère un défaut (par exemple).

L’équipe a compris que les problèmes se situent dans le système et non chez les personnes. Lorsque l’on part du principe que la personne est à l’origine du problème, on s’arrête à une opinion souvent biaisée nous dédouanant de la recherche d’autres causes plus factuelles. Cela présente les inconvénients majeurs de 1/ ne pas être actionnable (ne pouvant donc pas déboucher sur des améliorations) et 2/ de générer des tensions inutiles entre les personnes. »

Source : Culture Kaizen, la transformation des petits matins, C. Dijoux, N. Ploquin, T. Broche, OCTO Technologie, 2023

Penser à l’envers (référence à Taiichi Ohno) est une des difficultés du Lean. Une des histoires en est un bel exemple : « Dans l’entreprise classique, on pense souvent qu’améliorer le relationnel permettra d’améliorer l’opérationnel. Dans l’entreprise Lean, on fait l’inverse : on travaille sur l’opérationnel à travers des sujets spécifiques, pour aller chercher des petites réussites, ensemble, et inscrire l’ensemble de l’équipe dans une boucle vertueuse. Le NPS interne de l’équipe complète est passé de -40 à +10. Ce n’est pas encore idéal, mais la tendance est très positive. »

Le Lean Management, c’est s’intéresser vraiment à ses collaborateurs ; ce ne sont pas juste des mots lancés en l’air. Marc Demougeot[1], un des manageurs de Veolia, a cette phrase très intéressante : « Mettre sur la table des problématiques énoncées par les collaborateurs qui les vivent au quotidien a permis de mettre en lumière des dysfonctionnements qu’on n’aurait pas pu envisager si nous les avions pris avec une approche Top Down. »

Culture Kaizen, le vaccin contre la maladie de l’IT

Au travers de toutes ces histoires (et si on y ajoute les miennes et celles d’autres coachs que nous connaissons bien), nous pourrions déduire que les équipes informatiques – quelle que soit l’entreprise – ont toute la même maladie, contagieuse qui plus est.

Les équipes IT accompagnées ont quasi toujours les mêmes symptômes. La Culture Kaizen présentée par OCTO est, d’une certaine manière, un centre de vaccination. En aidant les équipes et le management à pratiquer avec rigueur les principes et techniques du Lean Management, c’est donner l’accès aux vaccins pour éradiquer cette maladie contagieuse, qui se diffuse toujours trop vite dans le domaine de l’IT.

À la lecture de cet ouvrage, posez-vous la question : avons-nous les mêmes symptômes ? Avons-nous la même maladie ? Plus vous serez honnête avec vous-mêmes (des chiffres et des faits !), plus les chances de guérisons seront grandes. Si vous pensez que ce n’est pas pour vous, je vous invite à lire cet article : Le Lean, ce n’est pas pour moi !

Cependant, n’allez pas croire que pour arriver à de telles épiphanies (mot favori de Cecil Dijoux), il suffira de claquer des doigts, d’envoyer une équipe en formation, d’avoir des yellow, green et black belts (qui n’ont d’ailleurs aucun lien avec l’histoire du Lean)… Non, il vous faudra trouver les bons coachs capables de comprendre votre situation pour construire le chemin d’apprentissage des équipes.

Apprendre à prendre le temps !

Dans mes propos liminaires, j’indiquais qu’une transformation Lean nécessite du temps. Marc Demougeot[1] et Jean-François Jurado[2] de Veolia partagent les conseils suivants :

Je conseillerais [à un pair] de se former au plus vite pour comprendre les grands principes et de tester sur un petit périmètre. Tout d’abord disposer des bons acteurs : sponsor, coach interne, manager, équipes sur les bons périmètres. Ensuite, ne pas être pressé dans la volonté de transformation, progresser lentement et sûrement. Enfin, anticiper la pérennisation dès le départ pour que la phase de transformation s’inscrive dans le temps et que les efforts soient capitalisés dans la durée. »

Source : Culture Kaizen, la transformation des petits matins, C. Dijoux, N. Ploquin, T. Broche, OCTO Technologie, 2023

Lisez Culture Kaizen d’OCTO !

Je n’en dévoilerai pas plus sur le contenu de ce livre blanc. Si je n’avais qu’un conseil à vous donner, ce serait de lire Culture Kaizen d’OCTO, du petit pas au bond de géant pour l’IT.

Bonne lecture !

Notes :

Marc Demougeot est (au moment de cet entretien) Directeur des Systèmes d’Information de l’activité Eau de Veolia en France, une organisation d’environ 500 personnes qui gère les services numériques de quelque 14 000 utilisateurs internes pour 4 000 clients (collectivités, etc.) répartis sur l’ensemble de l’hexagone.

Jean-François Jurado est manager Architecture & Méthodes et directeur du programme de transformation. Il veille à la définition et la mise en application des bonnes pratiques pour l’ensemble de la Direction des Systèmes d’Information de l’activité Eau de Veolia en France. Jean-François a dirigé la mise en œuvre du Lean au sein de cette dernière

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